Nous avions été prévenus aux 4000 îles (les visas et les frontières étant un sujet particulièrement prisé dans les rencontres de voyageurs !) : la frontière Laos/Cambodge est horrible et peut coûter cher ! Nous nous préparons donc psychologiquement pour son passage, avec pour mot d’ordre : on ne lâche rien !
Nous nous séparons d’avec Pascale pour passer la frontière : elle part avec un car rempli de voyageurs occidentaux, tandis que nous passons à vélo tous seuls.
Point de vue cyclo
Un autre cyclo roule avec nous près de la frontière et nous confirme que tous les douaniers demandent des dollars en plus. Sa technique pour passer est simple : payer ! Pas question pour nous de nous laisser faire. Comme il s’arrête pour prendre quelques provisions avec ses derniers kip laos, nous approchons de la frontière sans lui : cela nous laissera, pensons-nous, le temps de négocier avant qu’il n’arrive et ne paye tout.
Voyons les différents pièges à touristes et comment nous nous en sommes sortis (ou pas) !
1- Tampon de sortie du Laos
Le premier guichet est celui qui fournit le tampon de sortie. Malheureusement, l’encre au Laos doit coûter cher, car il faut subventionner les douaniers de deux dollars par personne pour obtenir le petit tampon !
Le groupe d’américains qui nous précède se fait littéralement plumer, de bon gré : “Zut, j’ai du payer 5$ en plus des 2$ normaux parce que je n’avais pas ma carte de sortie”, ou “on est le week end donc c’est encore 1$ de plus”. La scène est de plus vraiment affligeante : la fenêtre étant exprès très petite et très basse, il faut se baisser pour parler avec les douaniers, mais les américains avaient trouvé une autre technique : ils se mettaient tout simplement à genoux devant le guichet !
J’avais une photo de cela, mais elle a disparu avec les autres photos de la fin du Laos lors d’une mauvaise manip. C’est vraiment dommage, car il est difficile de se rendre vraiment compte de l’absurdité de la situation ! A genoux devant des douaniers qui ne connaissent que deux mots d’anglais : “PAY” et “DOLLAR” !
Nous avons donc laissé passer le groupe en question, puis nous nous sommes présentés avec nos passeports. “PAY DOLLAR” ! Sourire, et réponse en bon anglais “no pay, stamp free”. “PAY DOLLAR, PAY !”, “No”. Le douanier a l’air très surpris, ça n’a pas l’air d’être dans ses habitudes qu’on lui refuse l’argent, et pour cause : presque tout le monde présente son passeport avec les billets dedans ! Comme nous refusons, il ferme la fenêtre du guichet. Nous restons devant sans broncher : nous ne sommes pas pressés !
L’autre cyclo australien fini par arriver, et nous demande si le guichet est fermé : non, les douaniers sont toujours derrière, mais boudent ! Il tente une petite négociation, mais fini par payer l’équivalent de deux dollars, mais en monnaie locale : ça l’arrange, cela ne lui servira pas au Cambodge.
Par principe, nous refusons cette solution de facilité. Nous nous prenons un peu pour des résistants luttant contre la corruption ! 🙂
Nous discutons un peu plus tard avec un français qui lui arrive au Laos : il a tenté lui aussi de résister aux demandes d’autres douaniers, avec la technique du reçu officiel (qui dissuade généralement les douaniers), mais raté, cette fois ils en ont un ! Par contre il n’est pas de deux dollars, mais de 10000 kips, l’équivalent d’un euro. Il a donc dû payer.
Eglantine ne veut rien lâcher du tout, mais je commence à m’impatienter, et lance dans la négociation que si on paye, il nous faudra le reçu. Le douanier s’énerve un peu mais accepte. Par contre nous n’avons pas assez de kips, il se contenteront d’un peu moins que les 20000 kips “officiels”. Ayant envie de se débarasser de nous, ils prennent l’argent, tamponnent nos passeports et ferment à nouveau la fenêtre du guichet : tant pis pour les reçus !
Nous avons donc mis une demi-heure pour passer le premier guichet, en payant un petit peu… La victoire n’est pas totale, mais nous avons résisté, et c’est ça que nous trouvons important. De toute façon ce n’est que le début du parcours du résistant (ou du pigeon !) : de nombreux pièges restent à éviter !
2- Quarantaine
A peine sortis du Laos, nous tombons sur des pseudos infirmiers en blouse ridicule qui nous sautent dessus pour nous faire venir au petit stand en face du guichet de la douane cambodgienne : examen médical, obligatoire ! Et payant bien sûr !
Le voyageur français nous ayant prévenu que cela ne servait strictement à rien, nous ignorons les appels dans un premier temps. Ensuite, comme ils insistent, nous disons que nous voulons d’abord voir les tarifs du visa. “After, after !” nous contentons-nous de dire. Les douaniers sont de mêche, mais pas très convaincants. Petit à petit ils lâchent prise : nous leur glissons entre les doigts, mais comme c’est une arnaque il finissent par nous oublier, s’occupant des nouveaux arrivants, bien plus dociles.
3- Visa “on arrival”
Nous n’avons pas encore notre visa pour le cambodge, mais savons qu’il est possible de l’avoir sur place pour 20$ (ou 20€, bonjour la conversion !). En arrivant au guichet, on nous annonce 25$. Nous leur demandons avec le sourire de ne pas nous faire payer d’extra, mais ils disent que c’est comme ça c’est le prix.
Comme je n’avais pris que 40$ sur moi, cela vient dans la conversation entre Eglantine et moi : “De toute façon je n’ai pas assez”. Le douanier, qui parlait français, a dû l’entendre, car très peu de temps après il se dirige vers le guichet, sort 10$ de son portefeuille et les met avec nos 40$ pour payer nos visas !
Très drôle comme manière de faire : “c’est bien 50$ pour deux, la preuve c’est que le douanier a dû payer le reste pour nous !”. En tout cas nous sommes assez surpris de la facilité et de la rapidité avec laquelle nous nous sortons de ce piège !
4-Tampon d’entrée au Cambodge
Nous nous dépêchons de nous diriger vers le dernier piège, le tampon d’entrée, car les douniers du visa s’agitent pour essayer de dire des trucs à ceux du tampon… On est peut-être parano, mais comme nous n’avons pas payé au visa le “supplément tampon”, peut-être vont-ils nous embêter là-bas… D’autant plus que la quarantaine nous attend aussi devant !
Nos vélos déjà prêts à partir, bien après la barrière, nous faisons tamponner rapidement et cassssssos ! Enfin libres
Conclusion
Comme vous avez pu le voir, la frontière est vraiment un piège à pigeon, organisé et bien rôdé. Le prix de la corruption est connu, et beaucoup le payent d’ailleurs d’avance, en toute bonne conscience. En effet, dans le car de Pascale, tout le monde a payé au chauffeur du car 30$ pour passer la frontière (en plus du prix du trajet bien sûr), soit 1/3 de plus que le prix normal. ‘”C’est comme ça, on peut pas faire autrement.”
La preuve que non. Nous avons réussi à passer en ne payant “que” 10000kip (~1$) par personne, au lieu de 10$ pour ceux du car, ou 9$ (2$(tampon)+1$(quarantaine)+5$(visa)+2$(tampon)) pour le cyclo autralien.
Si tout le monde résistait un petit peu à ces personnes qui pensent avoir du pouvoir grâce à leur uniforme, le passage de frontière ne serait pas devenu à ce point verreux !
Fin de l’histoire !
Supplément gratuit :
Un peu après la frontière, nous voyons sur un parking un des bus avec lequel le groupe de Pascale est parti ce matin : les voyageurs sont là, en plein soleil, depuis deux bonnes heures, à attendre quelque chose, sans savoir quoi ! Leur chauffeur est introuvable, c’est le mystère. Ils n’en peuvent plus, on les comprend ! Heureusement, Pascale a pu partir avec un autre bus ! Ouf ! Sympa en tout cas le passage de frontière avec les bus du Laos, c’est la cerise sur le gâteau !
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