Shanghai : la ville, côté historique. Avec un peu d’histoire du coup.

Nous avons vu le côté Pudong, bâti depuis les années 1990. C’était déjà le siècle précédent, mais la ville est là depuis quand même un peu plus longtemps !

Longtemps longtemps, ou juste longtemps ?

Durant l’histoire millénaire de la Chine, Shanghai n’était en gros qu’une petite ville de pêcheurs. Ce n’est que vers les années 1800 que son développement l’a amené à devenir une ville commerciale majeure d’Asie, sa position ayant été renforcée par l’influence étrangère directe. La ville a en effet été habitée par des anglais (à la suite de la guerre de l’opium -> oui oui, la guerre POUR l’opium !), auxquels sont venus s’ajouter américains, français, puis japonais… Cela favorise la diversité !

A partir de 1850, des pans entiers de la ville ont été construits par les étrangers, et cela se voit encore à l’heure actuelle : comment expliquer les maisons individuelles avec un toit comme chez nous dans un pays dont ce n’est pas du tout le style ? Et pourquoi se sent-on chez soit dans les rues du quartier de l’ancienne concession française ? Je vous laisse deviner avec la photo suivante :

Tout un quartier avec des routes bordées de platanes : la classe française à Shanghai 😉

La concession française a semble-t-il été un lieu particulièrement animé : jeu, opium et prostitution en font « le plus grand bordel du monde » ! Bravo, vive la France à l’étranger ! Mais avec tout cela s’est forgé un côté culturel très fort et qui reste ancré dans la ville. La ville a pourtant connu depuis des périodes un peu difficiles… Pour situer cela, un peu d’histoire est nécessaire !

Petit résumé des épisodes précédents.

Je passe sur les 5000 ans de dynastie/chaos/dynastie, ça serait trop long et surtout trop compliqué. Commençons plus tard : en 1912. La dynastie Qing tombe, suite à ses nombreux échecs militaires et politiques : la république de Chine est proclamée, avec Sun Yat-Sen à sa tête. Mais ce n’est pas si facile. Un an plus tard, la présidence est cédée au chef de l’armée, Yuan Shikai, en échange de son soutien (ce qui s’appelle aussi « coup d’état »).

Celui-ci tente de rétablir l’empire à son profit en 1915, mais les oppositions sont grandes, à l’étranger comme dans les provinces chinoises, et il échoue. Ses 83 jours de règne ne lui auront pas réussi, car il meurt en 1916 d’une crise de foie, laissant le pays sans gouvernement central fort.

Les seigneurs de la guerre

Les désaccords entre les différentes factions politiques au pouvoir donnent lieu à de nombreuses manigances (je vous passe les détails, un peu tordus), qui conduisent à un éclatement de la « république » : l’empereur est alors ré-embauché dans une nouvelle restauration de l’empire, bientôt à nouveau écrasée, laissant place à une dictature, etc etc… la politique de la Chine à ce moment là est un peu comme à Shanghai plus tard, « le plus grand bordel du monde » !

L’expression suivante, utilisée pour décrire la situation politique, résume bien : c’est la période des seigneurs de la Guerre. Chaque province dispose de son armée et de ses revendications, et tente de les faire valoir à Pékin, où le chaos politique est alors total.

Et pendant ce temps là… (non, pas à Vera Cruz, mais plus au Sud : Canton)

Depuis Canton, Sun Yat-Sen, écarté du pouvoir, développe son propre parti, le Kuomintang (parti nationaliste chinois). En 1924, soutenu par l’Union soviétique, il crée une académie militaire qui forme une armée de métier, l’armée nationale révolutionnaire. Avec celle-ci, et Tchang Kaï-chek à sa tête, il planifie l’Expédition du Nord, opération militaire visant à se débarrasser des seigneurs de la guerre pour unifier la Chine. En 1926, celle-ci se lance finalement sans lui, car il meurt d’un cancer en 1925. Tchang Kaï-chek avance sans trop de mal en Chine, recevant le soutien de la population et de certains seigneurs de guerre. En 1928, c’est réglé sur le papier.

Et Shanghai dans tout cela ?

Shanghai n’a pas attendu l’armée du Kuomintang pour se débarrasser de celle des seigneurs de la guerre. Elle se « libère » toute seule grâce à une forte mobilisation opérée par le parti communiste, alors allié du Kuomintang.

Cependant, Tchang Kaï-chek voit d’un mauvais œil cette démonstration de « force » du parti communiste. Contrairement à Yat-Sen, il n’est pas pro-communiste, et décide avant d’installer son gouvernement d’effectuer une purge du parti : à Shanghai, ouvriers et communistes sont désarmés. Des manifestations de protestations sont écrasées par la force, et toutes les organisations communistes sont dissoutes. Bilan : 5000 personnes sont portées disparues après ces événements : c’est le massacre de Shanghai.

Encore une guerre civile…

La radicalisation anti-communiste du Kuomintang est mal perçue en Chine, et cet événement va déclencher une vague de révoltes dans le pays. De nombreuses insurrections sont réprimées, comme le soulèvement de la récolte d’automne, conduite par Mao Zedong. C’est le début de la guerre civile, qui durera jusqu’en 1949 !

Shanghai, finalement

Shanghai pendant toute cette période est donc une ville spéciale en Chine, avec ses étrangers et son fort pouvoir commercial. Elle va continuer à attirer les convoitises, notamment japonaises. En effet, ceux-ci, dans leur élan expansionniste ayant commencé en 1932 avec la Mandchourie, vont attaquer Shanghai en 1937 et l’occuper pendant huit ans. Cette période n’a pas vraiment profité à la ville, mais son déclin a été encore plus marqué après la victoire de Mao Zedong sur les troupes de Tchang Kaï-chek : en effet, comme symbole du capitalisme étranger, la ville n’était pas considérée comme un bon modèle par le nouveau gouvernement communiste, et son développement a été complètement gelé. Durant la « révolution culturelle », pas moins d’un million de Shanghaiens ont été ruralisés par exemple.

Ce n’est finalement qu’en 1990 que le développement de la ville a été relancé réellement, au rythme fou qu’on lui connaît aujourd’hui.

La ville a donc plusieurs visages, ou plutôt un visage à plusieurs facettes, rappelant chaque période de son histoire. Cela évolue vite en ce moment, et certaines facettes risquent de disparaître sans doute. Ce post étant déjà assez dense, nous verrons donc dans les prochains les spécificités de la ville : ses artères, les lilongs, les anciennes concessions, les nouveaux quartiers et tout et tout !

Ensuite, vous serez prêt pour l’interro d’histoire de Shanghai !

2 réflexions sur « Shanghai : la ville, côté historique. Avec un peu d’histoire du coup. »

  1. Dereix AF

    merci pour ce commentaire historique bien intéressant. mes souvenirs de Shanghai n’ont rien à voir avec ce qu’est maintenant cette ville, sauf cette vue du quartier français ! Il y a de très belles images de Shanghai de nuit dans le dernier james Bond Skyfall que nous avons vu à La Baule, lors de nos vacances à Assérac avec henri, chantal et anna. On a pensé à vous et à toutes vos découvertes; Bises AF

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