En arrivant dans la cité impériale, nous sommes déjà dans le pays depuis un mois et demi et nous rêvons encore de temples shinto, de geisha et de cérémonies de thé qui font encore cruellement défaut à notre expérience japonaise.
Et oui, nous avons beau voyager depuis un moment, nous sommes encore remplis de clichés, et nos attentes, surtout pour le Japon, sont énormes, voire, sans rapport avec la réalité…
Un rêve qui devient réalité
Quelle joie lorsque nous arrivons à Kyoto : voilà notre rêve qui devient réalité ! Tous les éléments de notre imaginaire sont réunis : les grandes portes rouges des sanctuaires shinto, les geisha qui déambulent dans les petites rues “anciennes” et des maisons de thé aux jardins zen un peu partout dans la ville. Comme vous le voyez, les photos sont nombreuses !
Nous passons un long moment à Kyoto, et après une semaine, nous sommes loin d’avoir fait le tour. La ville est grande et chaque quartier a ses spécificités. Nous vous avons déjà parlé de Nishijin, avec le centre du textile, mais ce n’est pas le quartier le plus touristique et nous y reviendrons plus tard.
Les endroits “à faire” sont le quartier de Hishigayama, à l’est de la ville. Sur le flanc de la montagne, nous passons de temples bouddhistes en sanctuaires shinto en surplomb de la ville. C’est vraiment incroyable ce quartier. Nous avons l’impression d’être en pleine forêt par moments. Nous ne sommes pas rentrés dans tous les lieux de cultes, seulement les endroits accessibles gratuitement et nous avons déjà amassé des tas d’images cultes (pardonnez le jeu de mot vaseux…) !
Ensuite, nous nous sommes promenés dans les petites rues de Gion et de ses alentours. Gion est connu pour être le quartier des Geisha, on en reparlera. C’est surtout un quartier très restauré, nickel : les murs en torchis, les toits en tuiles noires, les lattes en bois devant les vitrines, il y a jusqu’au revêtement de la route qui est beau ! Ces ruelles sont investies par tout un tas de boutiques de produits d’artisanat de plus ou moins bonne qualité. On a pu déguster des spécialités à tous les stands, on avait presque l’impression d’être au salon de l’agriculture, rayon bouffe ! Et il n’y a pas à dire, les japonais ont l’art de la présentation culinaire. Et si nos papilles ne se délectent pas du azuki (pâte de haricot rouge qui garnie la plupart des pâtisseries), nos yeux sont fascinés pas la perfection de la mise en scène gastronomique.
Et enfin, il y a l’autre rive de la ville, avec le palais impérial (on a hésité à planter la tente dans les jardins impériaux, mais on a trouvé des endroits moins fréquentés finalement !), le château et, si on pousse un peu, le fameux Temple d’or. Je n’énumère pas la multitude de monuments indiqués dans les guides, seulement ceux que nous avons approchés. En fait, nous n’avons visité aucun de ces endroits, cela vous parait étrange ? C’est que c’est un peu à l’approche de ces endroits “à faire absolument” que le rêve prend fin.
Un réveil difficile
Cependant, tous ces joyaux, tous ces fantasmes qui constituaient notre imaginaire japonais sont dans un contexte qu’il est difficile d’ignorer.
D’abord, il y a le contexte de la ville : une métropole dense et active actuelle où panneaux de signalisation et camions viennent encombrer le paysage. Mais ce n’est pas ce qui nous a le plus perturbé. Nous sommes en pleine
saison des cerisiers en fleurs et il y a un monde fou venu visiter. Les gens en eux-mêmes ne sont pas un problème, en plus, la plupart des touristes sont japonais et se promènent en kimono, alors c’est plutôt pittoresque.
L’image que l’on se faisait des jardins zen et des temples calmes perd du coup beaucoup de magie.
Ensuite, il y a notre contexte à nous : nous sommes dans une des plus belles villes du monde, il n’en reste pas moins que nous restons voyageurs à vélo. Et le métier de baroudeur au Japon n’est pas simple. Si, théoriquement, nous pouvons installer la tente dans les parcs, dans une ville où tous les 500 mètres il y a un monument classé au patrimoine mondial de l’Unesco, il faut faire attention. Nous devons donc dénicher des endroits cachés ou abandonnés, nous nous interdisons l’utilisation du réchaud au risque d’être repérés, nous arrivons tard le soir et partons tôt le matin. Malgré ces précautions, nous ne manquons pas de nous faire visiter par les policiers une nuit… Le matin, faute de réchaud, nous allons dans les combinis demander de l’eau chaude et on en profite pour aller aux toilettes. Cette situation, qui, pourtant, ne diffère de tout le reste du voyage que par peu de points, devient exténuante sous les regards méfiants et méprisants de la population… Nous essaierons de faire attention aux regards que nous portons aux clochards désormais !
Un retour à la réalité, charmante à défaut d’être confortable
Nos désillusions et notre situation de SDF ne doivent pas nous empêcher d’apprécier les charmes de cette ville incroyable. Tous les jours, nous devons nous faire violence pour reprendre le dessus. Mais si nous sommes repoussés par les files de touristes devant un ticket à 10 euros pour voir quelque chose qui est plus beau en photo qu’en réalité, nous allons chercher plus loin ce qui nous touche.
Dans les petites rues, les petites boutiques, là où il se passe quelque chose avec les gens d’aujourd’hui. Avec de la curiosité et un peu de culot, nous poussons les portes de la générosité et de l’échange. Nos meilleurs souvenirs de la ville ne seront définitivement pas ces grandes portes et ces femmes fardées “pour de faux”, mais un atelier d’aïkido impromptu, une dégustation de tisane à l’étage d’un collectif d’artistes ou encore cette foire d’artisanat où nous nous sommes essayés au tournage de poterie !